COCTEAU ET LA JEUNESSE

Revue littéraire INSTINCT NOMADE

Bernard Deson* m’a renouvelé sa confiance en me demandant un article sur Jean Cocteau pour le numéro 12 de sa revue littéraire, Instinct Nomade.

Je vous fais part de cette publication maintenant car il accompagne mon été depuis sa sortie en juillet 2023 tant il est incroyablement riche. Le premier texte évoque l’enfance du poète et a naturellement été confié à la romancière Dominique Marny, petite-nièce de Cocteau, puis la vaste panoplie des thèmes abordés se déploie avec notamment ses rapports avec d’autres artistes comme Proust, Satie, Max Jacob, Picasso, Modigliani, Mauriac, Truffaut, Brassens, Piaf, Marianne Oswald, ses différentes périodes de création, la grande année 1921, les cruciales années 30, sa réinvention de la mythologie, toutes les cordes de sa lyre et, bien sûr, ses amours … La multiplicité des points de vue des contributeurs reflète la diversité du talent de Cocteau.
Il est également à saluer que ce numéro en particulier est illustré d’un nombre généreux d’illustrations dont la qualité est parfaitement réjouissante.
Pour ma part, j’ai choisi d’évoquer COCTEAU ET LA JEUNESSE qui l’a côtoyé en postérité. J’y parle notamment de la série Twin Peaks de David Lynch qui fut diffusée à la télévision française au tout début des années 90, et dans laquelle il est frappant de constater combien Lynch partage la poésie de l’entre-deux mondes de Cocteau. Voici le début de ma contribution :

« Cocteau et la jeunesse, c’est bien sûr celle qu’il a passionnément aimée et fréquentée, nombre de contributeurs à ce numéro l’ont brillamment illustré. Mais c’est aussi la jeunesse qui l’a côtoyé en postérité. Celle qui, comme moi, adolescente des années 80 a bu à son intarissable veine. Car un grand poète ne meurt jamais, et encore moins Cocteau, artiste medium passant et dépassant les frontières entre les arts aussi bien qu’entre les mondes matériels et immatériels. Qui pouvait mieux entrer en résonnance avec les adolescents que nous étions alors ? Boules de contradictions assaillies d’émotions, envahies de sensations. Trop plein, foisonnement. Beau et morveux méli-mélo de grands enthousiasmes et d’insondables angoisses. Terrifiés et fascinés par la vie comme par la mort.

« Voilà pourquoi la mort également m’effraye,
Et me fait les yeux doux ;
C’est qu’une grande voix murmure à mon oreille :
Pense à mon rendez-vous »
Plain-Chant

Nous ne le réduisions pas à un dandy touche-à-tout, nous-même prenions pose sur pose et n’étions pas creux pour autant. Il nous montrait par l’exemple qu’on pouvait être artiste-orchestre sans friser le ridicule, qu’il était possible d’être multiple ET cohérent. Sa profusion créatrice ouvrait les possibles, faisant espérer pallier notre profond sentiment d’incomplétude. En expliquant qu’il changeait de branche mais restait toujours dans le même arbre, Cocteau nous donnait le droit à la complexité. «

* Bernard Deson est auteur, éditeur, peintre et poète. Sa maison d’édition, Germes de Barbarie a publié une centaine de livres. Il a également créé la revue littéraire Instinct Nomade, consacrée aux artistes et écrivains. Douze numéros passionnants et pointus magnifiquement illustrés par lui-même et son complice José Correa.

Un commentaire

  1. Avatar de Odile JEANNIER BRAS Odile JEANNIER BRAS dit :

    Toujours aussi modeste, pertinente et talentueuse chère Anne !

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