27, 28 et 29 Mai 2023
A partir de 11h00 au Moulin, venez !








Vivre l’instinct présent
Dans la presse et tous les médias
A partir de 11h00 au Moulin, venez !
Dans la revue : Les univers du Livre Actualitté (c) par Laurence Biava
Anne a depuis l’enfance un don particulièrement encombrant : elle entend les pensées sexuelles des gens. Devenue journaliste parisienne, elle a réussi à occulter cette faculté, mais s’en trouve à nouveau investie lorsqu’elle se rend dans une librairie érotique pour écrire un article.
Tout d’abord accablée par ces images qui la propulsent dans la vie intime de ceux qu’elle croise, la jeune femme tente d’apprendre à maîtriser cette aptitude pour le moins perturbante. C’est avec l’aide d’une vieille dame, d’un arbre et d’un libraire qu’elle réussira à vaincre ses préjugés et magnifier cette apparente malédiction.
Le livre d’Anne Vassivière tombe à brûle-pourpoint pour mettre un peu de merveilleux dans nos vies complexifiées par la crise, la dangerosité. Ce livre est excellent, léger et grave à la fois, souvent rabelaisien, cash et cru.
…
Qui pourrait ne pas se retrouver dans ces histoires courtes très bien élaborées, ces scènes qui font mouche, ces descriptions à la fois sommaire et précises ? Deux rencontres poétiques, l’une avec un arbre, l’autre avec une dame plus âgée, sont vers la fin du livre, des merveilles de grâce et de subtilité.
….
C’est en sortant d’un concert de Brigitte Fontaine au Trianon en 2012 que j’ai pris conscience de l’ambivalence qui marque ma relation à cette artiste. Un évènement m’avait en effet tellement choquée pendant le spectacle, que j’avais quitté les lieux avant la fin. Je rentrais ensuite à pied à la maison pour me calmer et, pendant une grosse heure, chacun de mes pas martelait une drôle de rengaine : « Cette femme, je l’aime, je l’aime pas, je l’aime, je l’aime pas… »
Alors quand Bernard Deson* m’a demandé une chronique sur elle pour sa revue Instinct Nomade, j’ai creusé plus profond… jusqu’à faire de belles ou terribles rencontres : moi enfant, Jacques Higelin, moi adolescente, Alain Bashung, Marianne Faithfull, moi adulte, Hippocrate, Charcot, Cantat, Camille Claudel, Michel Foucault, Paul Briquet, Gilles de la Tourette, Jean-Luc Godard…
Cela a donné un article intitulé Brigitte Fontaine ? Mon cœur balance…, que je suis heureuse de voir figurer dans l’excellent numéro consacré à Joseph Delteil (octobre 2022).
*Bernard Deson est auteur, éditeur, peintre et poète. Sa maison d’édition Germes de barbarie a publié une centaine de titres. Il a également fondé la revue littéraire Instinct nomade, consacrée aux artistes et écrivains. Onze numéros passionnants et pointus, magnifiquement illustrés par lui-même et son complice Jacques Ibanèz.
La plupart de mes bons camarades ont récemment découvert un travail que je montre peu, ma peinture.
Qu’est-ce qui m’avait jusqu’à présent retenue de montrer largement les fruits de cet aspect de ma création, moi qui ne craint pas d’écrire l’humain jusqu’au noyau de sa chair ?
La pudeur.
J’ai constaté que même mes textes les plus crus ne me dénudent pas autant que pinceaux et couleurs. L’auteure de polars n’a tué personne, l’autrice de textes érotiques n’a pas expérimenté tout ce qu’elle évoque, la peintre, elle, est passée par tous les états d’ombre et de lumière qu’elle couche sur la toile.
Qu’elles figurent des visages ou non, toutes mes peintures sont des portraits qui me dévoilent en plumes, papiers de soie, dentelles et dorés. Je n’ai jamais été douée pour la réalité. Ce que je laisserai de message à mes enfants sera toujours plus fort dans une peinture que dans le regard d’une photographie, c’est là que je me livre le plus car je n’y maitrise aucune réserve. Chaque peinture est un dernier message, chaque touche est impérative et ne sait pas tricher. Je peux feindre en portrait, prendre un air grave, inspiré ou léger, mais force est de constater que je m’incline en peinture devant l’inconditionnel. Que je ne sais rien en fuir. Aucune de mes toiles n’est aboutie, elles sont donc toutes à mon image et je dois en accepter la fragilité.
La peinture est mon lieu privilégié de grand vertige et je lui fais une confiance absolue, elle me connait mieux que quiconque, mieux que moi-même. Elle est ma plus belle confidence, mon ultime aveu sans cesse renouvelé.
Mes toiles sont trop pleines, pas assez sobres, pas suffisamment structurées ? Sans doute, oui. Oui, c’est certain. Je ne sais pas faire autrement que remplir ce qui m’est donné de vie, jusqu’à ce que ça déborde. Le désir ne se plait pas au tri. Adolescente, j’allais au bord de la rivière pour essayer d’en capter les flots, c’est l’idée que je me faisais du peintre : quelqu’un qui attrape la vie et la pose sur une toile. Je peignais aussi sur les vitres des fenêtres de ma chambre. Quand j’étais lassée de ces formes de fleurs et d’archanges, j’effaçais et créais de nouveaux vitraux naïfs.
J’ai aujourd’hui peu d’idée préconçue de ce que je veux inviter sur la toile, outre la sincérité de l’élan. Je laisse venir équilibres et déséquilibres. La peinture est réussie si elle me fait traverser une multitude de strates en même temps. Si je ne sais plus exactement où je suis, dans l’eau, dans l’air ou sur la terre. Dans le visible ou l’invisible. En moi ou au-dehors. Partout. Les supports ronds ou ovales m’appellent particulièrement : ce sont des portes grandes ouvertes. Mais je n’en fais pas de portraits explicites, comme il serait attendu. J’y invite d’autres royaumes. Contrairement aux toiles carrées et rectangulaires, les rondes et ovales n’ont pas besoin d’être brusquées pour accoucher.
« Viens dans mon cocon, me disent-elles, j’essaime des ventres pleins, j’accouche d’œufs de lumière, d’ovales de couleur. Viens dans la ronde avec moi, tout est courbe dans nos corps. Trop d’angles de mort dans le monde au-dehors. Le globe terrestre me porte comme je te porte comme tu me portes. Comme il nous porte, petits et grands. »
Une toile peut être retouchée et complétée des années durant. L’œil attentif y verra toutes les strates de mon existence jusqu’au présent. Qu’elles datent d’aujourd’hui, d’hier ou d’avant-hier, elles dévoilent toutes mes mues. Elles racontent ma naissance, la petite fille que j’étais, l’adolescente, la mère, l’amante, l’amie. Sans doute révèlent-elles aussi qui je serai à ma mort.
Fille de fusion et de profusion, je cherche dans la peinture l’éclat du premier rire d’enfant, le suc des fleurs et l’élan des légendes. J’en éclabousse les regards pour qu’ils ne se fanent jamais. Amoureuse de tout ce qui porte aile, c’est avec du ciel plein les bras que je peins des chapelles d’herbes, d’air et d’eau qui coure. La couleur est ma prière. C’est une joie pleine, forte et fragile.
Je réponds à la vie et à la mort par la profusion, mes toiles libèrent le cheval au galop qui habite ma poitrine, elles changent en fonction de la lumière et évoluent au gré du jour. Dorés, argentés, cuivrés, touches brillantes, plumes, collages et paillettes les font vibrer différemment tout au long de la journée. Elles respirent, elles sont vivantes et souvent aussi naïves que moi.
« J’aime ta façon naïve. » me dit l’ami poète Eric Poindron.
Les personnes qui me connaissent mieux que moi-même sont mes enfants, mes toiles et mes compagnes/compagnons les plus sincèrement oiseaux.
Merci à celles et ceux qui ont accueilli cet aveu d’une semaine à la Galerie Le bonheur est dans l’instant. Et qui m’ont écrit…
« J’ai découvert une nouvelle nuance dans la palette d’Anne Vassivière. Sa plume est agile, et en plus, elle peint. Ses toiles sont des mondes foisonnants où tout se combine en explosions de couleurs, de textures, avec une composante commune : la touche solaire qui existe dans toutes ses créations. »
« Après la rondeur des mots, la lumière des êtres, voici la calligraphie de l’âme. Merci d’ouvrir ces portes pour nous. »
« Un hommage à la vie ! A toutes les vies lumineuses que nous sommes ! »
« Un bel endroit, de belles œuvres, de belles personnes dont toi. Tu sais réunir et réussir cela. »
« Il est des instants suspendus qui comptent, et celui-là en fait partie ! »
« Anne, ton cœur est coloriste, solaire ! »
« Le talent et la gaité. »
« Lumineuse, inventive, imaginative exposition d’Anne Vassivière. Couleurs, matière, formes, tout étonne et séduit ! »
« Explosion de couleurs et de partage. »
« Comme un vol de luciole… »
« Tes tableaux te ressemblent, ils sont beaux à tomber. »
« Pétillantes toiles de la dame à la poésie contagieuse. »
« Explosion de couleurs et foisonnement de mille détails ! J’adore ! Très belles œuvres…coup de cœur ! »
« Travail riche ! Magnifique ! »
« Lumière, couleurs, effervescences, et puis…Toi. »
« Moment magique. »
« Les compositions d’Anne, comme son écriture, provoquent des émotions sans pareil. »
« Très lumineux, très subtil. »
« A la fois de l’inédit, finement créatif, et du familier où on retrouve quelque chose de toi, sans doute une lumière, des étincelles. »
« C’est splendide, vraiment ! »
« Energie généreuse et précise, aux 1000 envols et reflets à chaque instant. »
« Nous sommes entrainés dans des paysages abstraits et énigmatiques dont Anne garde le secret. »
« Exposition enchanteresse. »
« Merci pour ce moment intense, j’en ai pris plein les yeux, Poissons, Papillons, Plumes, Paillettes. Je m’en souviendrai, je chercherai cette signature intemporelle. »
« Quel travail magnifique, quel bel ensemble ! »
« Anne, ensorceleuse aux doigts de fée. »
« Je connaissais Anne Vassivière en tant qu’autrice, je viens de la découvrir artiste-peintre. Joie de vivre, légèreté, printemps et rêve en peinture ! »
« Comme c’est beau ! »
« Les unes nous câlinent, les autres nous transportent. Merci pour ce voyage féérique. Longue vie à l’art et bravo ! »
« Les toiles d’Anne nous plongent dans un répertoire singulier, des compositions dont la facture n’appartient qu’à elle. »
« Ces toiles sont une invitation à la rêverie. »
« Revenir aux fondamentaux, la tête pleine des couleurs posées sur ses toiles par Anne Vassivière. »
« Cette exposition est un enchantement. »
** pour peindre, je dois revenir totalement dans le corps et me défaire du monde extérieur et de son jugement. C’est pourquoi je suis incapable de peindre en compagnie. Je ne tolère que musique ou radio. Je me rends à l’atelier en ½ heure de métro ou ¾ heure de bus qui sont consacrées à me vider la tête de mes contemporains en les regardant comme une race extérieure à moi-même. Le trajet est utilisé comme sas pour arriver à l’atelier en pleine possession de mon énergie corporelle propre. Je n’y vais que si j’en sens l’urgence me dévorer suffisamment pour traverser tout Paris.
** pour écrire, c’est le processus inverse : je dois totalement m’extraire du corps, résister à aller le balader alors que le soleil brille, refuser d’aller lui poser le derrière dans l’herbe du parc d’à côté pour parler amour et sens de la vie avec les copines. Il ne faut pour autant pas oublier ces sensations car je dois aller les chercher pour écrire suffisamment incarné et trouver écho avec lecteurs et lectrices. Il s’agit donc d’un grand écart constant et épuisant.
*** pour peindre, je déballe tout, j’étale tout : tout doit être à immédiate disposition parce qu’une fois que la vanne est ouverte, ça fuse, ça ne s’arrête guère. Tout, c’est quoi ? Tubes de peintures diverses, feutres, crayons de couleur, pastels, plumes, serviettes de papier coloré, feuilles d’or, dentelles de vieux sous-vêtements usés, papier de soie, papiers brillants de chocolats, cigarettes et Mozart Kugeln, pigments fins, ficelles, bouts de laine etc… Si je commence ma journée de peinture après 10 heures, j’estime que ça ne vaut pas la peine. Je m’arrête faute de carburant vers 19h, exténuée.
*** pour écrire, c’est l’exact contraire, tout doit être rangé : si tout est net à l’extérieur, tout le sera à l’intérieur. Le lieu le plus propice pour écrire, c’est donc la nuit. La nuit est un lieu plus qu’un temps puisqu’elle absorbe les heures dans son silence et en désamorce la déflagration. C’est le lieu béni où, pour citer Jules Renard dans son journal d’écrivain « On ne provoque pas : on attend. »
La nuit est l’incarnation de la solitude nécessaire à l’écriture, elle est la porte privilégiée vers l’inconnu qui s’invite sur la feuille.
J’y écoute son silence bavard, j’y entends mieux ce qui m’est dicté. Car si c’est par l’intermédiaire d’autrui que je suis devenue autrice, intimement, c’est-à-dire dans le faire, je me sens scribe. L’écriture me réveille la nuit pour m’obliger à au moins 2 insomnies créatives par semaine. La 3ème est offerte.
Comme nous l’explique Laurence Biava dans son excellent Le Goût de l’écriture au Mercure de France, « L’inspiration est un saisissement ». J’ajouterai même qu’écrire a quelque chose de brutal qui est peu enviable. Quand l’injonction d’écrire se pointe, j’essaie souvent et en vain de faire diversion en m’activant soudainement à des tâches subsidiaires et ménagères. Je tente de fuir car je sais que ça va être violent, que s’il s’agit d’une vague « honnête », elle va m’entrainer dans des profondeurs peu agréables. Écrire, n’est-ce pas souvent faire ce travail que lecteurs et lectrices sont soulagés que l’écrivaine fasse à leur place ?
Pour moi, peindre et écrire, c’est se livrer pieds et poings liés à une tension immense qui, régulièrement semble vaine.
**** je travaille sur 8 à 10 toiles en même temps. Pendant qu’une stagne, l’autre réclame une couleur ici un trait là, celle-ci sèche dans son coin, celle-là se débloque parce que j’ai trouvé le point d’équilibre sur la 5ème, je découpe un bout de la 6ème pour le coller sur la 7ème, cela déclenche une nouvelle idée sur la 8ème et ainsi de suite…
Cette profusion m’oblige à gérer l’espace de l’atelier d’une façon extrême : tout l’espace étant occupé, je dois travailler assise, debout ou accroupie par terre.
« Le pinceau est la canne blanche du peintre qui cherche à avancer. » De Galienni.
**** peinture et écriture se rejoignent sur ce point : j’écris plusieurs romans, nouvelles ou articles à la fois. Mon premier roman est un roman choral avec 16 personnages dont les histoires s’entrelacent dans un même immeuble.
Que ce soit dans cet ouvrage ou dans ceux qui suivent, ce sont clairement les personnages qui dictent et je rédige, c’est pourquoi je rature peu. L’immense travail consiste ensuite à nettoyer et mettre en place, c’est le travail de l’autrice. L’œuvre se dicte, je récolte. Ne dit-on pas « prêter » sa plume ?
« Je suis seulement l’ouvreur de fenêtre. Le vent entrera après tout seul. » Jean Giono.
J’ai la conviction d’être scribe car je ne peux guère créer si mon ego n’a pas été muselé avant. Je dois en faire table quasi rase sinon je fais « du coloriage ». Pendant « le faire », l’ego est obstacle. Je dois faire le vide car contrairement au néant qui est absence d’énergie qui aspire tout, le vide est champs de possibilités.
Dans Le degré zéro de l’écriture, Roland Barthes parle « d’une poussée, non d’une intention ».
Ma démarche est autrice, ma pratique est scribe. Que ce soit en peinture ou en écriture.
* Les citations sur l’écriture sont tirées de l’ouvrage de Laurence Biava, Le goût de l’écriture, publié au Mercure de France
Les mots ont-ils un pouvoir aphrodisiaque ? Si oui, quels sont ceux qui excitent et ceux qui rebutent ? Comment parler de sexe et raconter le désir ? Peut-on tout écrire ? Quelles scènes érotiques parlent le plus aux lecteurs ? Nous avons demandé leur avis à plusieurs auteures, et c’est Anne Vassivière qui ouvre le bal…
« Vivre l’instinct présent », tel est le mantra d’Anne Vassivière, l’auteure de Parties Communes, un livre qui pénètre les pensées intimes des douze habitants d’un même immeuble. Dans ce roman, Anne interroge les relations humaines, amoureuses et charnelles. Elle se met dans la tête de chacun de ses personnages, elle voit et donne à voir à travers le prisme de l’autre, permettant ainsi de mieux le comprendre. Rencontre avec une auteure qui invite à partir à la recherche de l’autre et à la découverte de soi.
« Quelle est la scène érotique que vous avez écrite dont vos lecteurs vous parlent le plus ? »
Ce ne sont pas forcément les scènes les plus explicites qui plaisent le plus. C’est plutôt celles de troubles et de gourmandise. Ce qui est cru est différent de l’excitation. L’avantage de ce roman choral avec douze personnages est que chaque lecteur se retrouve un peu dans l’un d’eux. Et si l’immeuble haussmanien offre une unité de lieu, on trouve des personnes de styles très différents selon que l’on vive partie cour ou pas.
Enfin, il me semble que les hommes, qui « intellectualisent moins », qui sont moins dans la pensée, cherchent ou trouvent des réponses à leurs comportements et à leurs sentiments à travers cette lecture. Comme je l’ai fait pour mieux les comprendre à travers l’écriture.
Quels sont les écueils à ne pas commettre quand on parle « sexe » ?
L’effet catalogue est à éviter, comme les propos non crédibles, trop loin de la réalité de tout un chacun, les images trop clichés, les mièvreries : un château, un homme riche et sa secrétaire. Les facilités et le manque de nuances sont aussi très dommageables. Par exemple, cette vision manichéenne d’une femme soit soumise soit dominatrice, comme s’il n’y avait rien entre les deux… A contrario, le fait de parler avec sincérité, de dire aussi ce qui foire, de ne pas avoir de fausses pudeurs ni de fausses impudeurs, tout cela apporte de l’authenticité à l’histoire. Comme le fait de montrer des personnages qui changent et qui évoluent, qui sortent des stéréotypes. Je crois que le but est de réenchanter la sexualité.
« Quels sont les trois mots qui revêtent à vos yeux le plus de capital érotique ? Pourquoi ? »
Dans Parties Communes, le Dr Dupuis dit « vagin » comme un Graal, c’est là un mot magnifique, tandis que Ben, un autre personnage pas très recommandable, en fait quelque chose plein de mépris, il exploite le terme froidement. Bon, j’ai des limites, je n’aime pas « salope » par exemple, mais je suppose que c’est personnel. Vous connaissez le dicton « on peut rire de tout mais pas avec tout le monde » ? Je pense que c’est pareil avec le désir et l’amour : on peut jouir de tout mais pas avec tout le monde. Les allitérations comme dans petite culotte, je trouve ça joli, ou les sonorités des mots cuisses, entrecuisses, fouiller. Les impératifs peuvent être beaux aussi.
« Et les trois qui, à l’inverse, en possèdent le moins ? »
« Nibard » je trouve ça laid, mais « lolo » ou « nichon » c’est pareil, pour moi c’est tue-l‘amour…
« Un (hot) livre de chevet à conseiller ? «
Ce n’est pas parce que c’est ma bonne camarade de Point G, M-A Chabarni, qui l’a écrit que je conseille Deux jours avec lui. C’est l’histoire d’une femme qui entre en contact avec un homme sur internet et, après quelque temps, où le lecteur attend avec elle, la rencontre se fait… Que se passe-t-il charnellement ? intérieurement ? Chacun va montrer ses failles et ses faiblesses pendant deux jours et ils ne se reverront pas. Le deal initial était purement sexuel mais ils vont apprendre quelque chose d’eux-mêmes et de l’autre. C’est sincère et plein de suspense. Dans un autre style Les Gouvernantes, d’Anne Serre : trois sœurs dans une grande maison qui cherchent à vivre d’érotisme et de fantasmes… Jubilatoire !
Dans son émission Crac-Crac, Monsieur Poulpe invite sa mère et ses copines pour un « Book Club ». Elles décryptent les livres à leur manière.
Parties communes, d’Anne Vassivière, fait partie de la nouvelle collection créée par Octavie Delvaux au printemps dernier, pour la Musardine, intitulée «. G ». L’objectif : se distinguer de la romance érotique avec des romans singuliers, exigeants, écrits par des femmes porteuses d’un univers érotique fort.
Anne Vassivière ne pensait pas écrire seule, au départ. Dans son roman racontant la vie sexuelle et amoureuse d’une vingtaine de personnages dans un immeuble parisien – une sorte de Vie mode d’emploi, de Georges Perec, version X-, elle a cherché un partenaire d’écriture masculin pour compléter son regard d’auteur femme. « Mais ça a été un vrai fiasco ! raconte-t-elle. Je ne trouvais chez ces auteurs, des amis, aucune souplesse dans l’imagination : tous les personnages masculins se ressemblaient, leur ressemblaient à eux ! Du coup, je me suis dit que je devais trouver en moi ce que j’avais de masculin. Je regardais, dans le métro, les femmes. Je les voyais tantôt comme des proies, comme le fait un de mes personnages, tantôt comme des déesses, comme le fait un autre.»
C’est son premier roman érotique, son premier roman tout court. À 50 ans, elle a voulu écrire ce qu’elle voulait lire, ce qui lui fait comprendre « ce qui se passe dans la tête de [ses] contemporains ». Elle cite comme référence Patrice Chéreau, qui, au théâtre ne dirigeait pas ses acteurs depuis la salle mais sur scène. « Il murmurait aux oreilles des acteurs et actrices. J’ai tenté de faire le même chose que Chéreau : je me suis mise tout près de mes personnages. Pour qu’ils murmurent à mon oreille. »
Voici un article, publié dans le Magasine Sexualités Humaines n°34 par Agnès Verroust
Ce roman a éveillé chez moi des réminiscences cinématographiques : certains se souviendront peut-être d’Escalier C, de Jean-Charles Tacchella, avec Robin Renucci et Jean-Pierre Bacri (1985).
Parties communes, d’Anne Vassivière, nous fait assister à la vie des habitants d’un immeuble haussmannien, dont la façade est en ravalement. En pensant à ce roman, c’est le mot ‘ entropie » qui m’est venu à l’esprit. Derrière l’échafaudage, l’ordre règne sous la houlette de la très convenable Nadège Duderval, la propriétaire. Les secrets restent bien gardés, les frustrations couvent, et l’on prépare la fête des voisins. Quand le désir s’en mêle, les certitudes s’effondrent, les couples se défont, et de multiples combinaisons verront le jour entre les personnages. Le secret du quatrième étage sera dévoilé, et triomphera l’amour. Un nouvel ordre s’établira, pour le bonheur de tous, ou presque…
Parties communes est un roman érotique écrit pour les femmes, avec des situations et des mots crus, des scènes pornographiques. Si « le meilleur moment de l’amour, c’est quand on monte l’escalier », c’est qu’on n’a pas monté ces escaliers-là ! Les locataires s’y croisent et s’y emmêlent, multipliant les possibles. Le sexe y est parfois graveleux, parfois magique, parfois raté, parfois savant, parfois gourmand. Le lecteur trouvera de jolies inventions de langage : « du passé, il me table rase » ; « je l’y millefeuillette, elle m’y croquenbouche ».
Chaque personnage raconte à la première personne, avec son propre style, son vocabulaire, son point de vue. Certes, ils sont un peu caricaturaux : Nadège Duderval la coincée, son fétichiste de mari tout autant, le très macho Jean-Do, Carole experte en simulation, Ben le misanthrope, le Jeune Homme du cinquième dans le rôle de l’Amoureux, Michèle et Catherine, les sœurs ennemies…C’est d’ailleurs un des intérêts de ce roman, de dire les choses du sexe de plusieurs façons, poétique ou vulgaire, précise, obscène, selon les protagonistes.
Et puis, mine de rien, ce roman parle aussi de l’échec de la communication dans les couples, des femmes qui n’osent rien dire et des hommes qui n’écoutent qu’eux-mêmes (mais ça pourrait aussi être le contraire), de l’amour du sexe et du sexe sans amour ; de la découverte de l’autre et de soi-même, bref, de toutes ces choses dont parlent les femmes entre elles.